Les Polonais
Dès le début de son existence, la forteresse de Modlin devait beaucoup aux Polonais, notamment à des ingénieurs militaires qui surveillaient les travaux de fortification sous Napoléon (p. ex. Ignacy Prądzyński). Elle a également joué un rôle prépondérant à l’occasion de plusieurs épisodes cruciaux dans l’histoire de la Pologne, à commencer par l’insurrection de novembre de 1830, quand la citadelle a été reprise par les insurgés pour servir de point de ravitaillement à l’armée polonaise. À cette occasion, on a réalisé des travaux de fortification avec l’idée de moderniser l’enceinte et d’éliminer les erreurs commises par les ingénieurs français. Le chantier était dirigé par l’ingénieur militaire August Szulc et le commandant de la forteresse, le général Ignacy Ledóchowski. Les insurgés de 1861-64 avait également Modlin dans leur collimateur puisqu’ils envisageaient de mettre la main sur les dépôts de munitions russes. Malheureusement, leur projet fut démasqué. À ce titre, il est intéressant de rappeler que le général Ivan Dehn, qui dirigeait le grand projet de modernisation de l’enceinte entamé par les autorités russes en 1832, s’est servi de projets élaborés par Ignacy Prądzyński et a fait appel à des ingénieurs polonais.
Cela dit, la période polonaise dans l’histoire de Modlin n’a commencé qu’à la fin de la première guerre mondiale quand un groupe de soldats polonais a désarmé le garnison allemand en place. Une fois les Allemands partis, l’armée polonaise y a pris ses quartiers. Le colonel Edward Malewicz est devenu le premier commandant polonais de Modlin.
La Grande guerre venait seulement de se terminer quand la citadelle est de nouveau sollicitée dans le cadre de la guerre polono-soviétique de 1920.
Une fois les hostilités terminées, Modlin, malgré les dégâts subis, a non seulement conservé son statut de garnison importante, mais s’est également transformé en un centre de formation militaire de référence. En effet, la place forte a accueilli le Corps de cadets, l’École des aspirants des armes blindées et le Centre de formation de sapeurs. En même temps, elle hébergeait différentes unités d’infanterie, de sapeurs et de génie militaire. Qui plus est, quand le chef d’État Józef Piłsudski a émis son décret du 8 novembre 1918 sur la mise en place de la Marine de guerre, la forteresse de Modlin est devenue la première base des forces navales polonaises. À ce titre, un chantier adapté à la construction de petites embarcations y a été aménagé.
Avec le passage du temps, la forteresse a été déclassée au rang de camp fortifié. L’armée se contentait du maintien des constructions et du renforcement des fortifications déjà en place. Par exemple, en 1924, on a inauguré une centrale électrique mise en place par le Bataillon électrotechnique, et l’on a érigé plusieurs immeubles d’habitation supplémentaires. L’ancienne cathédrale orthodoxe a été transformée en église catholique. Dans les mois qui ont précédé l’éclatement de la Seconde guerre mondiale, plusieurs nouveaux abris de combat ont été construits.
En septembre 1939, la forteresse de Modlin a joué un rôle important dans le cadre du système de défense de Varsovie. Le garnison, qui comptait 17 mille soldats, n’a capitulé devant les Allemands que le 29 septembre, un jour après la capitulation de la capitale, après de longs combats héroïques.
Une fois la guerre terminée, le garnison de Modlin a été réduit à plusieurs milliers de soldats. Dans les années suivantes, de nombreux bâtiments ont été déconstruits, y compris l’église de la caserne. En revanche, une importante base aérienne a été mise en place. En 1958, Modlin a accueilli la prestigieuse École supérieure de pilotage, école-mère de milliers d’aviateurs militaires polonais. En plus, Modlin servait de base à la 45e Escadrille d’essais techniques. Aujourd’hui, le tarmac et les infrastructures appartiennent à l’Aéroport de Mazovie Varsovie-Modlin, l’autre aéroport civil de la capitale polonaise après l’aéroport Frédéric Chopin.
Il est également à noter que le cimetière de la forteresse, mis en place probablement par les Allemands (la sépulture la plus ancienne date de 1915), s’est conservé jusqu’à nos jours. Les enterrements se sont poursuivis au-delà de la Grande Guerre, puisqu’on y retrouve des tombes datant aussi bien de l’entre-deux-guerres que de la Seconde guerre mondiale. Le cimetière accueillait non seulement les soldats, mais également leurs proches.